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La Lettre A2CS - Juillet & Aoùt 2022

05/08/2022

Les transferts de déficits en cas de fusion, une opportunité ?

A l’occasion d’une opération de fusion-absorption, il apparait souvent l’existence de déficits fiscaux imputables à la société absorbante, en provenance de la société absorbée. Véritable avantage fiscal, l’imputation de ces déficits est bien souvent subordonnée à l’obtention d’un agrément de l’Administration fiscale. C’est dans ce contexte que le législateur a décidé de simplifier son octroi (loi n°2012-1479 du 28 décembre 2019).

C’est ainsi que certains transferts de déficits ne sont donc plus soumis à l’agrément de l’Administration fiscale, tels que dans les cas suivants :

  • Lorsque le montant cumulé des reports est inférieur à 200.000 euros ;
  • Les déficits ne proviennent pas de participations financières ou de la gestion d’un patrimoine mobilier ;
  • Durant la période pendant laquelle la société a constaté ces agrégats, la société n’a pas cédé ou cessé l’exploitation d’un fonds de commerce.


Une distinction importante entre activité économique et patrimoniale en matière de para-hôtellerie

A la lecture des nouveaux commentaires de l’Administration fiscale, la location meublée est considérée comme une activité à caractère « patrimonial ». Cette qualification doctrinale exclut de nombreux mécanismes fiscaux qui trouvent à s’appliquer aux activités « économiques ».

Dans quelles mesures une location revêt-elle le caractère « économique » ?

A la lumière des récentes décisions du Conseil d’Etat, le juge reconnait le caractère « économique » de la location lorsque celle-ci est assortie :

  • D’une « prestation d’hébergement » dite « para-hôtelière » ;
  • Lorsque le propriétaire du logement « en assure directement la gestion, et supporte les charges de gestion conséquentes ».

Du fait de sa décision du 19 avril 2022 n°442946, le Conseil d’Etat établit une distinction importante dans la qualification fiscale de l’activité de location.

Nous vous conseillons de privilégier et de fournir plusieurs prestations de services à vos locations, ce qui permet de la définir comme activité « économique ».

Pourtant, à la vue de cette décision, de nombreuses interrogations persistent. Ces activités « économiques de para-hôtellerie » sembleraient répondre aux exigences de l’article 150-0 B ter du CGI, sous réserve d’une étendue de prestations de services à leur adjoindre.

Il appartiendra aux juges de clarifier ces points de droit.


La perte pour une holding de la qualité d’animatrice met-elle en cause l’exonération du dispositif Dutreil ?

Les sociétés holding, animatrices de leur groupe, peuvent bénéficier d’une exonération de droits de mutation à titre gratuit (DMTG), via le mécanisme du régime Dutreil (art 787 B du CGI). L’exonération partielle de ces DMTG est conditionnée à un engagement de conservation sur plusieurs années.

En ce sens, la doctrine administrative imposait le caractère d’animation des holdings jusqu’au terme de conservation des titres.

Dorénavant, la Cour de cassation, par un arrêt du 25 mai 2022 (n°19-25.513), considère que la qualité d’holding animatrice s’apprécie au jour de la donation (2 ans), et non au cours du délai de conservation (4 ans).

La Cour de cassation, contredisant la doctrine administrative, étend donc le privilège de ce mécanisme aux sociétés ayant perdu leur caractère d’animation, pendant la durée de l’engagement Dutreil.


Le contrôle par l’Administration d’exercices « prescrits » en raison d’imputation de déficits antérieurs.

Le 13 avril 2022, la Cour d’appel de Paris a ajouté quelques précisions en matière de prescription d’exercices déficitaires.

En droit, l’Administration ne peut effectuer de contrôle sur des exercices prescrits.

La Jurisprudence tempère ce principe, en considérant que le mécanisme de report en avant des déficits permet d’imputer ceux-ci, sur le résultat fiscal d’un exercice non prescrit.

Dès lors, il est possible de contrôler les déficits initialement prescrits s’imputant sur des exercices non prescrits.

Par ce mécanisme, le contribuable ne peut opposer la prescription d’exercices ayant produit des déficits, si ceux-ci sont imputés sur les trois derniers exercices de la société.


Imputation de pertes générées à l’étranger : une avancée jurisprudentielle

Dans sa décision « Bevola », en date du 12 juin 2018, la Cour de Justice de l’Union Européenne actait l’imputation de déficits provenant de pertes définitives d’une succursale étrangère.

Le 9 juin 2022, la Cour administrative de Versailles complète cette jurisprudence administrative et acte l’imputation des pertes d’une société étrangère.

Le juge conditionne celle-ci, à quelques modalités, les pertes de succursales étrangères ne sont imputables lorsque la société qui les détient :

« a épuisé toutes les possibilités de déduction de ces pertes que lui offre le droit de l’état membre ou est situé l’établissement [et] elle a cessé de percevoir de ce dernier une quelconque recette ».

Il est à noter que le caractère définitif de ces pertes est apprécié souverainement par le juge du fond.

Ainsi le juge français, en accord avec la jurisprudence européenne, permet aux sociétés françaises d’imputer les déficits provenant de succursales étrangères.

Il est à noter, que, si la jurisprudence semble acter le sort des pertes provenant des succursales, il n’existe pas de données suffisantes informant du devenir des déficits de filiales étrangères.

La jurisprudence devrait se prononcer sur ce point.


Quid des modalités de valorisation de démembrement de parts sociales ?

Lors d’une cession d’actif, il convient toujours de s’interroger sur la valorisation de cet actif, en cas de démembrement. En ce sens, l’estimation d’un usufruit pourrait se fonder sur les revenus attendus. Une question persistait quant à la valeur de l’usufruit, potentiellement, corrélée à raison du montant provisionnel de la trésorerie et a fortiori de sa distribution future aux associés.

Par une décision du 20 mai 2022 (n°449385), le Conseil d’Etat distingue la valorisation d’un usufruit à la hauteur de la trésorerie disponible.

En cette espèce, la Rapporteuse publique Madame Céline Guibé tempère et affirme qu’il n’existe pas d’unique et seule, « bonne » évaluation. Il appartient aux contribuables de disposer d’arguments solides pour justifier la valorisation d’actifs démembrés.


L’opportunité d’octroi de stock-options d’une Société Anonyme (SA) à ses membres du Conseil d’Administration (CA)

L’article L225-177 du Code de Commerce dispose qu’une SA ne peut consentir à l’octroi de stock-options, qu’au Directeur Général, au Président du CA et aux membres du Directoire. Les textes excluent les membres du CA et ceux du Directoire, du dispositif. Certaines dérogations peuvent être possibles pendant deux ans, à compter de l’immatriculation, s’ils ont participé, avec des salariés à la constitution de la SA.

Pourtant, le comité juridique de l’Association Nationale des Sociétés par Actions (ANSA) apporte des précisions et dispose que les membres du CA et du Conseil de surveillance peuvent aussi bénéficier d’un octroi de stock-options, s’ils sont nommés ou s’ils ont apporté à la société, dans un délai de deux ans suivant l’immatriculation de la société.

Nouvel apport de cet avis : alors qu’une SA ne pouvait attribuer de stock-options aux associés qui détenaient plus de 10 % du capital, l’ANSA réhausse le plafond pour le fixer à un tiers du capital, si les stock-options sont octroyées dans le même délai de deux ans.


Possibilité d’octroi de Dommages et Intérêts pour une société présidente, révoquée de façon brutale

Le 30 mars 2022, une SARL, présidente d’une société, réclamait des dommages et intérêts (DI) pour révocation « brutale et vexatoire » de son poste de dirigeant, auprès du juge de la Cour de cassation.

Le juge de la Haute Cour accède aux demandes de ladite société et octroie des DI pour révocation dans des conditions « vexatoires et brusques ».

Nous comprenons, alors, qu’une personne morale peut, comme une personne physique, demander réparation d’un préjudice moral, lorsque celui-ci est justifié.

Pour rappel, le juge avait déjà, par le passé, octroyé des DI à une personne morale, à l’occasion de plusieurs décisions de justice. Ces dédommagements avaient pu intervenir lors d’atteinte à la marque d’une société dans l’opinion publique (Cass 30-06-2006), mais aussi pour concurrence déloyale (Cass 15-5-2012), etc.


L’acquisition de la clause résolutoire d’un bail suspendue par une procédure collective

En droit, le jugement d’ouverture de sauvegarde interdit toute action liée à une créance, née avant la procédure.

C’est ainsi que, la Cour de cassation, dans une décision, du 13-4-2022, dispose que toute procédure collective suspend toute action en justice qui n’a pas été passée en force jugée.

En espèce, le propriétaire de l’immeuble souhaitait opposer la clause résolutoire d’un bail, à son locataire, pour défaut de paiement. Néanmoins, celui-ci, a été placé sous sauvegarde.

En conclusion, le juge a refusé l’acquisition de la clause résolutoire du bail, par le propriétaire, car celle-ci était « paralysée » par la procédure collective du locataire.


L’inconstitutionnalité du droit de suite en matière de taxe foncière

A l’origine, l’article 1920, 2-2 du CGI, prévoit qu’en cas de transfert de propriété d’un immeuble, l’Administration pouvait recouvrir la taxe foncière de l’ancien propriétaire, non encaissée par le Trésor, sur les loyers du nouveau propriétaire.

Le Conseil Constitutionnel déclare l’inconstitutionnalité du texte, en raison de l’absence de solidarité entre l’ancien et le nouveau propriétaire.

De ce fait, le nouveau propriétaire ne devrait pas s’acquitter de l’impôt non recouvré. Ces dispositions portent une atteinte disproportionnée au droit de propriété.


Les dettes liées au Covid 19 - Charges à déclarer dans un tableau de suivi en annexe

Selon les recommandations de l’Autorité des Normes Comptables (ANC), les entreprises n’avaient pas à déclarer les impacts du Covid 19 dans leurs comptes, au-delà des informations déclarées en annexe. Dès lors, données et impacts du Covid 19 sur les sociétés n’ont vocation qu’à être indiqués en Annexe.

Aussi, pour compléter ces recommandations, le Conseil National de l’Ordre des Experts- Comptables (CNOEC) ajoute, qu’au-delà de la mention de ces données, liées au Covid 19, il appartient aux entreprises de faire figurer un tableau additionnel, récapitulant les postes de charges et dettes, augmentés en raison de la pandémie.

En ce sens, le CNOEC conseille alors de présenter les informations de manière fiable en regroupant toutes les informations complémentaires, afin de permettre une lecture précise des dettes (PGE, primes salariales, etc.) mais aussi des reports de paiements de dettes (fiscales, sociales, loyers, etc.).

Afin de faciliter l’établissement de ce tableau, le CNOEC a transmis un modèle que nous pouvons vous fournir, afin de les ajouter en Annexe, reflétant l’ensemble des impact et charges du Covid 19, sur vos entreprises.
      



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