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La Lettre A2CS - Novembre & Décembre 2020

08/11/2020

PLF 2021 : Un crédit d’impôt en cas d’abandon de loyers

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 prévoit d’instituer un crédit d’impôt au profit des bailleurs, personnes physiques ou personnes morales de droit privé, qui consentent des abandons de loyers aux entreprises locataires les plus durement touchées par les conséquences des mesures restrictives prises en vue de lutter contre l’épidémie de Covid-19.

Les abandons ou renonciations définitifs de loyers afférents à des locaux, hors accessoires, échus ou à échoir, qui ouvriraient droit au crédit d’impôt seraient ceux consentis, au titre de la période d’application du confinement, au profit d’entreprises locataires qui remplissent les conditions cumulatives suivantes :

  • elles prennent en location des locaux qui font l’objet d’une interdiction d’accueil du public au cours de la période de confinement commencée le 30 octobre 2020, ou exercent leur activité principale dans un secteur mentionné à l’annexe 1 du décret 2020‑371 du 30 mars 2020, dans sa rédaction en vigueur à la date de publication de la présente loi (il s’agit du décret relatif au fonds de solidarité) ;
  • elles ont un effectif de moins de 5 000 salariés ;
  • elles n’étaient, au 31 décembre 2019, pas en difficulté au regard de la réglementation européenne ;
  • elles n’étaient pas en liquidation judiciaire au 1er mars 2020.

Le crédit d’impôt serait égal à 50 % de la somme totale des abandons ou renonciations de loyers mentionnés ci-dessus. Toutefois, lorsque l’effectif de l’entreprise locataire est d’au moins 250 salariés, le montant de l’abandon ou de la renonciation au titre d’un mois ne serait retenu que dans la limite des deux tiers du montant du loyer prévu au bail échu ou à échoir au titre du mois concerné.

Par ailleurs, le montant total des abandons ou renonciations de loyers donnant lieu à crédit d’impôt dont bénéficie chaque entreprise locataire ne peut excéder un plafond de 800 000 €.

Pour les bailleurs passibles de l’impôt sur les sociétés, le crédit d’impôt serait imputé sur l’impôt dû au titre de l’exercice au cours duquel les abandons ou renonciations définitifs de loyers ont été consentis. Si le montant du crédit d’impôt excède celui de l’impôt dû au titre de cet exercice, l’excédent serait restitué.

Pour les bailleurs passibles de l’impôt sur le revenu, le crédit d’impôt s’appliquerait pour le calcul de l’impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l’année civile au cours de laquelle les abandons ou renonciations définitifs de loyers ont été consentis, y compris en cas de clôture d’exercice en cours d’année civile. Si le montant du crédit d’impôt excède l’impôt dû au titre de cette année, l’excédent serait restitué.


Holding mixte et Pacte Dutreil : la Cour de cassation s’est prononcée !

Après le Conseil d’Etat en janvier 2020 (CE, 23 janvier 2020, n° 435562), la Cour de cassation reconnait à son tour, dans un arrêt du 14 octobre 2020 (Cass. Com., 14 octobre 2020, n° 18-17.955 FS-PB), l’éligibilité des titres de holding mixte au régime du pacte Dutreil, sous réserve que l’activité d’animation soit prépondérante.

Elle précise que le caractère principal de l’activité d’animation de groupe de la holding doit être retenu, notamment, lorsque la valeur vénale, au jour du fait générateur de l’imposition, des titres de ses filiales représente plus de la moitié de son actif total.


TVA immobilière et droit à déduction

Dans un arrêt en date du 27 novembre 2020, le Conseil d’Etat (CE, 27 novembre 2020, n° 426091) a précisé que la TVA, ayant grevé l’acquisition d’un immeuble achevé depuis plus de cinq ans, acquis en vue de sa revente, ne peut donner lieu à déduction qu’au moment de sa revente lorsque l’option pour soumettre la cession à TVA est exercée.

Par conséquent, la TVA ne peut pas être déduite lors de l’acquisition, même si le bien est, dans l’attente de sa revente, affecté à des opérations de location soumises à TVA.


Revirement de jurisprudence : condamnation au pénal d’une société absorbante pour des faits commis par l’absorbée !

Dans un arrêt en date du 25 novembre 2020, la chambre criminelle de la Cour de cassation (Cass. Crim., 25 novembre 2020, n° 18-86.955 FS-PBI) a jugé qu’une société qui en a absorbé une autre dans le cadre d’une fusion peut, à certaines conditions, être condamnée à une peine pour des faits commis par l’absorbée avant la fusion.

Il s’agit là d’un important revirement de jurisprudence, dans la mesure où, jusqu’à présent, la chambre criminelle de la Cour de cassation écartait, en cas d’absorption d’une société par une autre dans le cadre d’une fusion, la responsabilité pénale de la société absorbante pour des faits commis par l’absorbée au motif que le principe de personnalité des peines s’opposait à la condamnation de l’absorbante.

La chambre criminelle précise la portée du revirement de jurisprudence en énonçant que le juge, qui constate la réalisation d’une fusion-absorption entrant dans le champ de la directive « fusion », et ayant entraîné la dissolution de la société poursuivie peut, après avoir constaté que les faits objet des poursuites sont caractérisés, déclarer la société absorbante coupable de ces faits et la condamner à une peine d’amende ou de confiscation.

La Cour pose certaines conditions pour qu’il y ait transfert de responsabilité pénale à l’absorbante : (i) l’opération doit entrer dans le champ de la directive « fusion », c’est-à-dire que les sociétés qui y participent doivent revêtir la forme visée par cette directive ; (ii) la fusion doit avoir entraîné la dissolution de la société absorbée ; (iii) seule une peine de nature patrimoniale (amende ou confiscation de bien) est susceptible d’être prononcée à l’encontre de la société absorbante.

De plus, la chambre criminelle pose une limite temporelle à l’application de sa nouvelle jurisprudence. Elle prévoit que ce revirement de jurisprudence ne peut pas s’appliquer aux fusions antérieures à son arrêt sans porter atteinte au principe de prévisibilité juridique résultant de l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’Homme. Dès lors, cette nouvelle solution ne s’appliquera qu’aux opérations de fusion conclues après le 25 novembre 2020, date de prononcé de l’arrêt commenté.

Enfin, la Cour de cassation prévoit également un transfert de responsabilité pénale lorsque, en fraude à la loi, l’opération de fusion-absorption a eu pour objectif de faire échapper la société absorbée à sa responsabilité pénale.


Mise en liquidation judiciaire d’une société rachetée dans le cadre d’un LBO : condamnation des dirigeants à combler le passif

Dans le cadre d’une opération de LBO, une société holding, créée à cet effet, avait acquis les titres d’une société. Or, trois ans après ce rachat, la société cible a été mise en redressement, puis en liquidation judiciaire.

Le liquidateur a poursuivi les dirigeants en responsabilité pour insuffisance d’actif, en raison de fautes de gestion consistant dans le versement par la société cible à la holding de dividendes, alors que la situation de trésorerie de la société cible était compromise, et dans le soutien financier abusif apporté par la société cible à l’une de ses filiales.

La Cour de cassation, dans un arrêt en date du 9 septembre 2020 (Cass. Com., 9 septembre 2020, n° 18-12.444 F-D), a condamné les dirigeants à supporter l’insuffisance d’actif de la société cible.

Pour cela, elle considère que la décision de verser des dividendes doit être prise au regard de la situation de la société et de sa trésorerie, quand bien même ces dividendes devraient être affectés dans le cadre d’une opération de LBO.

De plus, elle considère qu’il existe bien un lien de causalité entre l’insuffisance d’actif de la société cible, et la distribution des dividendes. A ce titre, elle considère qu’il était indifférent que la faute reprochée soit antérieure de trois ans à la constatation de l’insuffisance d’actif de la société. Les distributions de dividendes avaient privé la société cible de réserves anciennes qui auraient pu être affectées, par la suite, au règlement des dettes échues, ce qui suffisait pour caractériser l’existence du lien de causalité, et donc condamner les dirigeants.


PLF 2021 : Suppression de l’enregistrement obligatoire de certains actes des sociétés

Le projet de loi de finances pour 2021 (« PLF 2021 ») prévoit de supprimer l’obligation d’enregistrement pour les actes établis à compter du 1er janvier 2021 constatant (i) les augmentations de capital en numéraire et par incorporation de bénéfices, de réserves ou de provisions et les augmentations nettes de capital de société à capital variable constatées à la clôture d’un exercice ; (ii) l’amortissement ou la réduction du capital ; (iii) la formation de groupement d’intérêt économique (GIE).

Seuls demeureraient soumis à la formalité obligatoire de l’enregistrement les actes constatant la transformation, ou les augmentations de capital autres que celles visées ci-dessus, telles que les augmentations de capital en nature, ainsi que ceux portant cession de droits sociaux.

Par ailleurs, les greffiers des tribunaux de commerce seraient autorisés à recevoir en dépôt les actes des sociétés soumis à la formalité de l’enregistrement, ou de la publicité foncière, avant l’exécution de celleci. En application du présent texte, l’enregistrement préalable ne serait maintenu que pour les actes établis à compter du 1er janvier 2021 portant (i) transmission de propriété ou d’usufruit de fonds de commerce, de clientèles ou d’offices, ou cession de droit à un bail ou du bénéfice d’une promesse de bail portant sur tout ou partie d’un immeuble ; (ii)  cession de droits sociaux (y compris de participations dans des sociétés à prépondérance immobilière).


Possibilité d’établir des procurations authentiques sur support électronique

Un nouveau décret autorise, à compter du 22 novembre 2020, et sans limitation dans le temps, le notaire instrumentaire à établir une procuration sur support électronique, lorsqu’une ou les parties à cet acte ne sont pas présentes devant lui.

Cette comparution à distance est précédée d’une réunion, en visioconférence, au cours de laquelle toutes les informations auront été fournies pour éclairer le consentement des parties.

Le notaire recueille, simultanément avec leur consentement, la signature électronique de cette ou ces parties au moyen d’un procédé de signature électronique qualifiée.

L’acte est parfait lorsque le notaire instrumentaire y appose sa signature électronique qualifiée. 


TVA sur marge : précisions concernant le calcul du prix de revient des lots revendus

Dans une affaire récente, une société lotisseur avait acheté des terrains à bâtir sur lesquels elle avait fait réaliser des travaux, avant de les revendre. Une partie des terrains aménagés pour recevoir des équipements collectifs du lotissement n’était pas commercialisable.

Faisant application du régime de la TVA sur la marge, la société avait intégré au prix de revient de chaque lot vendu une quote-part du prix de revient de ces espaces, au prorata de la superficie propre à chacun de ces lots. Il en avait résulté une majoration du prix d’acquisition des terrains, ce qui avait réduit la marge soumise à la TVA. L’administration avait alors cherché à remettre en cause ce mode de calcul.

La Cour administrative d’appel, dans un arrêt du 9 juillet 2020 (CAA Bordeaux, 9 juillet 2020, n° 18BX02878), a rappelé qu’en cas de revente, par lots, d’un immeuble acheté en une seule fois pour un prix global, chaque vente de lot constitue une opération distincte, en raison de laquelle le vendeur doit acquitter une taxe calculée sur la base de la différence entre le prix de vente de ce lot et son prix de revient estimé, en imputant à ce lot une fraction du prix d’achat global de l’immeuble. Dans ce cas, le contribuable doit procéder à cette imputation par la méthode de son choix, sous réserve du droit de vérification de l’administration et sous le contrôle du juge de l’impôt.

Ainsi, c’est à bon droit que la société lotisseur avait calculé la marge à soumettre à la TVA en intégrant au prix de revient de chaque lot revendu une quote-part du coût des parcelles non commercialisables destinées aux équipements communs du lotissement au prorata de la superficie propre à chacun des lots.


Précision en matière de vente à la découpe et de droit de préemption du locataire

La loi prévoit qu’en cas de vente consécutive à la division, ou à la subdivision, d’un immeuble en plusieurs lots, le locataire d’un local d’habitation, ou d’un local mixte d’habitation et professionnel, bénéficie d’un droit de préemption (Loi 75-1351 du 31-12-1975 art. 10, I, al. 1 à 5).

Cependant, le Conseil d’Etat avait déclaré illégal l’article 1er du décret 77-742 du 30 juin 1977, pris pour l’application de l’article 10 susivsé, en ce qu’il n’excluait pas du bénéfice du droit de préemption les personnes dont le bail, ou l’occupation, était postérieur à la division de l’immeuble.

Ce défaut de rédaction du texte a été corrigé par le décret 2020-1150 du 17-9-2020. Ce décret précise que le droit de préemption reconnu au locataire d’un local d’habitation, en cas de vente à la découpe de l’immeuble dans lequel est situé le local, ne bénéficie pas au locataire dont le bail est postérieur à la division de l’immeuble.


PLF 2021 : Une ordonnance pour généraliser la facturation électronique ?

Un article additionnel du PLF pour 2021 prévoit d’autoriser le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de 9 mois à compter de la publication de la loi de finances pour 2021, toute mesure nécessaire permettant la généralisation du recours à la facturation électronique (« e-invoicing ») et la mise en œuvre d’une obligation de transmission dématérialisée de certaines données à l’administration fiscale (« e-reporting »).

Cette disposition fait suite au rapport de la DGFiP intitulé « La TVA à l’ère du digital en France ».

L’obligation du recours à la facture électronique serait mise en place progressivement selon les modalités suivantes :

  • dès 2023, obligation d’accepter la réception des factures électroniques pour l’ensemble des entreprises ;
  • entre 2023 et 2025, selon la taille des entreprises, obligation d’émettre des factures sous forme électronique.

La combinaison de la facturation électronique et de la transmission des données devrait permettre de procéder à des recoupements entre achats et ventes et, partant de mieux lutter contre la fraude fiscale, tout en rendant possible un pré-remplissage des déclarations de TVA. 

    



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