Retour

La Lettre A2CS - Septembre & Octobre 2020

20/09/2020

Nouvelle exonération temporaire pour les dons familiaux en espèces

La troisième loi de finances rectificative pour 2020 a institué une exonération de droits de mutation à titre gratuit, dans la limite de 100.000 euros, en faveur des dons de sommes d’argent, consentis entre le 15 juillet 2020 et le 30 juin 2021, au profit d’un descendant ou, à défaut de descendance, de neveux ou nièces lorsque ces sommes sont affectées, dans les trois mois, à la souscription au capital d’une petite entreprise européenne, à des travaux de rénovation énergétique, ou à la construction de la résidence principale du donataire.

L’exonération de droits est applicable aux seuls dons de sommes d’argent réalisés en pleine propriété. Aucune limite d’âge n’est fixée pour le donateur.

Le plafond de 100.000 euros s’applique aux donations consenties par un même donateur. Un donateur peut, ainsi, effectuer au cours de la période d’application du dispositif, plusieurs dons à des donataires différents, à conditions que le montant global de ses dons n’excède pas 100.000 euros.

En revanche, un même donataire peut recevoir en franchise de droits plusieurs dons de 100.000 euros, de donateurs différents.

A défaut de précision, la présente exonération devrait se cumuler avec celle applicable aux dons familiaux en espèces, et à l’abattement de 100.000 de droit commun.


Les intérêts de l’emprunt souscrit par une SCI pour racheter les parts d’un associé peuvent-ils être déductibles ?

La doctrine administrative (BOI-RFPI-BASE-20-80, n° 80) exclut toute déduction, du revenu foncier d’une société, des intérêts de l’emprunt que cette dernière a contracté pour racheter les parts d’un de ses associés.

Toutefois, le Conseil d’Etat a rendu plusieurs arrêts (CE, 9 juin 2020, nos 426339, 426342 et 426343) venant infirmer cette position de l’administration.

En effet, le Conseil d’Etat juge que les intérêts d’un emprunt contracté par une SCI, pour rembourser un associé de ses parts, sont déductibles, dès lors que l’emprunt est nécessaire pour la conservation du revenu foncier de la société.

En l’espèce, il a ainsi été jugé que les intérêts de l’emprunt souscrit par une SCI, propriétaire d’un complexe commercial donné en location, pour rembourser les parts d’un de ses associés qui a décidé de se retirer, sont déductibles dès lors que la société a été condamnée à rembourser les parts de l’associé sortant, et que l’inexécution de la décision de justice exposerait la société et les associés restants au risque de la vente du bien.


PLF 2021 : Mesures en matière d’impôts locaux

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 prévoit une baisse de la contribution économique territoriale (CET), composée de la CVAE et de la CFE.

Ainsi, la CVAE serait réduite de moitié pour les impositions établies à compter de 2021, passant ainsi de 1,5% à 0,75%.

Le taux de plafonnement de la CET en fonction de la valeur ajoutée serait abaissé de 3% à 2%.

Par ailleurs, sur délibération des collectivités concernées, les créations, et extensions d’établissements, à compter de 2021 pourraient bénéficier d’une exonération de CFE, et de CVAE, pendant trois ans.


PLF 2021 : Réévaluation libre des actifs

Le PLF pour 2021 prévoit une mesure temporaire de neutralisation des conséquences fiscales des réévaluations d’actifs.

Jusqu’à présent, la réévaluation libre de ses actifs corporels et financiers, par une société, était immédiatement imposée sur l’écart de réévaluation constaté.

Le PLF pour 2021 prévoit une mesure de tempérament permettant un décalage dans le temps de cette imposition, pour les opérations de réévaluation constatées au terme d’un exercice clos à compter du 31 décembre 2020, jusqu’au 31 décembre 2022.

Il s’agit d’une mesure optionnelle, qui consiste à instaurer un régime d’étalement, ou de sursis d’imposition, selon le caractère amortissable ou non des immobilisations réévaluées.

Ainsi, il serait prévu un régime d’étalement de l’imposition des écarts de réévaluation constatés, s’agissant des immobilisations amortissables.

Les écarts de réévaluation constatés, s’agissant des immobilisations non amortissables, bénéficieraient d’un régime de sursis d’imposition, maintenu jusqu’à la cession desdits actifs.


PLF 2021 : Etalement des plus-values immobilières en cas de cession-bail

Pour rappel, l’opération de cession-bail (« sale and leaseback ») est l’opération par laquelle une société, propriétaire et utilisatrice d’un immeuble, cède cet actif à un établissement de crédit qui le lui loue immédiatement aux termes d’un contrat de crédit-bail immobilier (CBI).

Jusqu’à présent, la cession de l’immeuble, à l’établissement de crédit, génère une plus-value, imposable chez le cédant.

Le PLF pour 2021 prévoit un étalement de l’imposition de la plus-value de cession sur la durée du crédit-bail, sans pouvoir excéder 15 ans.

Le bénéfice de cette mesure serait limité aux propriétaires utilisateurs, c’est-à-dire aux entreprises propriétaires d’immeubles affectés à leur activité commerciale, artisanale, agricole ou libérale.

Seraient ainsi exclus, les immeubles affectés par l’entreprise à des activités de gestion de son propre patrimoine, ce qui exclut, de facto, les sociétés foncières, dont l’activité est par nature patrimoniale.

Par ailleurs, il est prévu que cette mesure ne s’appliquerait qu’aux opérations de cession au profit d’un établissement de crédit, car la cession doit être suivie de la conclusion d’un contrat de CBI. Dès lors, une opération de cession-bail, sans avoir recours au contrat de CBI, à la suite de la cession, mais à un simple bail de longue durée, ne pourrait pas bénéficier de cette mesure. 


Le régime de l’Agent commercial revue par la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) !

En droit français, l’article L. 134-1 du Code de commerce définit l’agent commercial comme celui qui est « chargé, de façon permanente de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats (…) ».

La Cour de cassation avait posé pour principe que le pouvoir de négociation implique le pouvoir de modifier les tarifs du mandant, d’adapter les conditions, notamment tarifaires, des contrats qu’il propose à ses clients, d’accorder des remises, ou de disposer effectivement d’une marge de manœuvre sur une partie au moins de l’opération économique.

Cette position avait fait l’objet de critiques de la part de juges du fonds. Le tribunal de commerce de Paris avait, ainsi, transmis une question préjudicielle à la CJUE, portant sur la définition de négociation.

La CJUE a répondu dans un arrêt récent (CJUE, 4 juin 2020, aff. 828/18) « qu’une personne ne doit pas nécessairement disposer de la faculté de modifier le prix des marchandises dont elle assure la vente pour le compte du commettant pour être qualifiée d’agent commercial ». Compte tenu de cette jurisprudence, l’application du régime des agents commerciaux devrait désormais être facilitée.


Validation de la réglementation française sur les locations de courte durée par la CJUE

Pour rappel, afin de limiter le développement de la location saisonnière, notamment via AirBnB, et la pénurie de logements qui en résulte, plusieurs villes, dont Paris, ont mis en place une réglementation spécifique.

En effet, le changement d’usage de locaux destinés à l’habitation est subordonné à une autorisation préalable, délivrée par le maire de la commune.

Dans le cadre d’un litige, entre la Ville de Paris et des loueurs professionnels AirBnB, la CJUE a été saisie sur la question de savoir si cette réglementation est conforme au droit européen.

La CJUE, dans un arrêt rendu le 22 septembre 2020 (CJUE, gde ch. 22 septembre 2020, aff. 724/18), estime que la réglementation française soumettant à autorisation préalable la location, de manière répétée, d’un logement pour des courtes durées à une clientèle de passage, qui n’y élit pas domicile, est globalement conforme à la directive européenne « services ».

La CJUE a, toutefois, émis une réserve, concernant l’obligation de compensation. En effet, la réglementation précitée octroie la faculté aux communes d’assortir l’exigence d’autorisation préalable d’une obligation de compensation, sous la forme d’une transformation accessoire et concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage.

La CJUE a estimé que cette obligation de compensation est valide, au regard de l’exigence de proportionnalité, dans la mesure où elle est apte à garantir l’adéquation du régime d’autorisation aux circonstances spécifiques de chacune des communes concernées, sous réserve qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ledit objectif.

Elle renvoie au juge national le soin de vérifier si la possibilité d’exiger une compensation, dans certaines communes, répond effectivement à une pénurie de logements destinés à la location de longue durée sur les territoires concernés, et de vérifier que la détermination du quantum de l’obligation de compensation est adaptée.


Option pour la TVA en matière de location de locaux nus à usage professionnel : possibilité d’une option, local par local

Jusqu’à présent, l’administration fiscale considérait qu’en matière de location de locaux nus à usage professionnel, l’option pour la TVA devait couvrir obligatoirement tous les locaux non exclus de son champ d’application qu’un bailleur possède dans un immeuble ou ensemble d’immeubles donné.

Par un arrêt en date du 9 septembre 2020 (CE, 9 septembre 2020, n° 439143), le Conseil d’Etat a jugé qu’un contribuable donnant à bail plusieurs locaux nus à usage professionnel, dans un immeuble ou un ensemble d’immeubles, peut, certes, opter pour soumettre l’ensemble des locaux à la TVA, mais qu’il n’y est nullement obligé.

Le Conseil d’Etat a ainsi estimé que, dans cette situation, le contribuable peut tout à fait opter pour la soumission à la TVA de seulement certains locaux éligibles exploités dans un même immeuble ou ensemble immobilier.

Dès lors, une option pour la TVA, local par local, est désormais possible.

En revanche, la désignation des locaux concernés doit être réalisée sans équivoque. Si l’option n’identifie pas de manière expresse, précise, et non équivoque le ou les baux, ainsi que les locaux concernés permettant par là même d’en exclure les autres locaux, l’option sera présumée s’appliquer globalement à l’ensemble des locaux pour lesquels elle est possible.


TVA immobilière sur la marge : la saga continue !

Pour rappel, dans un arrêt du 27 mars 2020 (CE, 27 mars 2020, n° 428234), le Conseil d’Etat avait validé la condition d’identité juridique du bien, pour l’application de la TVA sur la marge.

Dans un arrêt du 16 juillet 2020 (CE, 16 juillet 2020, n° 435464), le Conseil d’Etat a refusé de transmettre au Conseil Constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui lui état soumise, portant sur l’interprétation de l’article 268 du CGI relatif à l’application de la TVA sur la marge en matière immobilière.

Selon le requérant, l’article 268 du CGI, tel qu’interprété par le Conseil d’Etat dans son arrêt de mars 2020, aurait méconnu les principes d’égalité devant la loi, et devant les charges publiques, en imposant de réunir, outre la condition d’absence de droit à déduction lors de l’acquisition d’un bien, une condition tenant à l’identité de qualification juridique entre le bien acquis et le bien vendu.

Les réponses de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE), saisie en juin dernier, de deux questions préjudicielles concernant le régime de la TVA immobilière sur la marge, sont encore attendues. Elles pourraient, le cas échéant, avoir une incidence sur le régime actuel, tel qu’interprété par le Conseil d’Etat.  


Quand faut-il déprécier les créances rattachées à des titres de participation ?

La CNCC a récemment répondu à la question de savoir si les créances rattachées à des participations doivent être dépréciées avant que les titres aient été totalement dépréciés, ou auprès.

La CNCC énonce deux cas dans lesquels les créances doivent être dépréciées, dès lors qu’il existe un risque de non-recouvrement à la clôture : en cas de décision d’abandon de créance, et en cas de litige.

Ainsi, la décision d’abandon de créance donne lieu à une dépréciation de la créance, celle-ci devenant définitivement irrecouvrable. De même, lorsqu’il existe un litige entre la société mère et la société fille sur une créance, la créance doit être classée en créance douteuse, et faire l’objet d’une dépréciation dans l’attente d’une possible décision d’abandon de créance de la société mère.

Néanmoins, en l’absence de litige ou d’abandon de créance, les créances rattachées à des titres de participation sont dépréciées, selon les règles générales, si la société est en mesure de démontrer que la solvabilité de la filiale est devenue douteuse.

Tel serait le cas, par exemple, lorsqu’une procédure de liquidation judiciaire a été ouverte contre la filiale, ou si celle-ci connaît des difficultés financières de nature à rendre son redressement improbable.

Les créances ne devraient, alors, être dépréciées qu’une fois les titres eux-mêmes complètement dépréciés. 
   
    



Télécharger le document au format PDF